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Littoscope : livraison finale !

Publié le 23/09/2021
Parmi les premiers projets labellisés SCO, Littoscope a rendu sa copie finale, un démonstrateur d’estimation des aléas et risques des submersions marines.

En janvier 2021, nous vous présentions la méthode Littoscope, un projet profondément SCO, juste après la première réunion de suivi du projet. Depuis lors, l’équipe a livré sa plate-forme web interactive aux deux territoires d’expérimentation, à savoir Gâvres (côte Atlantique) et la région autour de Palavas-les-Flots (Méditerranée), puis a collecté le retour de ces utilisateurs afin d’identifier de futures améliorations. Lundi 13 septembre, tous les acteurs se sont réunis pour un dernier débriefing autour de la version finale dotée des fonctions suivantes :

  • Visualisation de l’aléa submersion marine (hauteur d’eau en mètres)
  • Visualisation des indicateurs de risque
  • 24 scénarii personnalisables
Simulation montée des eaux à Gâvres

Simulation de la montée des eaux sur la ville de Gâvres que produirait en 2030 une tempête décennale tout en tenant compte de l’augmentation globale du niveau de la mer. © Littoscope

Le retour des utilisateurs

Rappelons que les territoires ont été intégrés tout au long du projet pour coller au plus près de leurs problématiques et de leurs besoins.

Qu’il s’agisse de la municipalité de Gâvres, de l’agglomération de Lorient, du Pays de l’or ou de Montpellier-Métropole, tous les représentants ont apprécié la façon innovante d’aborder le problème des submersions marines. S’ils regrettent une précision en élévation  des mesures satellitaires (de l’ordre de 1m) insuffisante en comparaison des autres moyens de mesure disponibles sur le territoire français, l’outil leur apporte déjà des réponses pour, à long terme, identifier les zones à risques sur leurs territoires. Ils évoquent par ailleurs un outil très pédagogique en termes de communication et de sensibilisation.

Vers un post Littoscope ?

Si l’accès à la plate-forme Web est maintenu pour les deux territoires, le projet est maintenant clos. Cependant, les utilisateurs attendent clairement une suite : d’une part en termes de précision, ce que les capteurs satellites toujours plus performants combleront dans un futur proche, et d’autre part pour intégrer aux projections des données hydrodynamiques comme la houle.

Dans cet esprit, Benoît Meyssignac, représentant du LEGOS, recommande une évolution des cartographies produites pour fournir, au-delà de la « simple » visualisation des scénarii calculés, le différentiel, donc la différence de hausse de la mer, entre deux scénarii basés sur les projections du GIEC (réduction drastique des GES ou non par exemple). Cela permettrait de « mettre en balance les efforts en termes d’adaptation et le retour sur investissements vis-à-vis des risques ».

Concluant la séance, Laurence Monnoyer-Smith, représentante du SCO France au CNES, ne cache pas son intérêt pour aller au-delà du démonstrateur : « Les échanges de ce jour montrent tout l’intérêt de la méthode Littoscope, capable de changer la donne pour les territoires. Le SCO se tient prêt à accompagner une toute dernière phase pour conduire une pérennisation des outils et la définition d’un service rentable afin de le déployer à l’international. Merci à tous ! »

Immersion technique

Pour ceux qui sont particulièrement intéressés par le projet Littoscope, voici un aperçu - non exhaustif - des ajustements auxquels a procédé l’équipe ces derniers mois. Les rapports seront prochainement disponibles sur le site du SCO.

  • Génération du Modèle Numérique d’élévation ou MNE : pour obtenir un profil altimétrique fiable, l’équipe a réalisé dans un premier temps un MNS à partir des données Pléiades à l’aide du logiciel CARS. A partir de ce MNS, un MNT est extrait en appliquant une méthode « Drap Cloth ». Le MNE final est obtenu en éliminant la végétation boisée (extraite par classification supervisée) et en conservant l’élévation du MNS sur les bâtiments. Les performances des MNE et MNT obtenus ont été évaluées par comparaison avec des données Litto3D (SHOM/ING) sur Palavas et des données Lidar du BRGM sur Gâvres.
Methode MNE

Le satellite voyant « du dessus », il interprète la surface de la canopée d’un végétal jusqu’au sol où, en réalité, seul le tronc fait obstacle à l’eau. Le MNS issu des données satellite doit donc être rapporté au MNT pour déduire le profil altimétrique réel.

  • Calage vertical terre/mer : par comparaison du MNT avec la surface moyenne océanique, il apparaît que le MNT doit être abaissé de 54 cm pour Palavas et de 44,8 cm pour Gâvres pour calculer une hauteur de submersion réaliste à long terme.
  • Modélisation HR des submersions avec le MNE : afin d’évaluer l’apport d’un MNE issu de données spatiales, le BRGM l’a injecté dans ses modèles de simulation de propagation des vagues et a mesuré l’impact dans le cadre d’un scénario recréant les conditions océanographiques de la dernière submersion majeure à Gâvres, la tempête Johanna le 10 mars 2008, puis ces mêmes conditions + un mètre de montée du niveau moyen de la mer. Par comparaison avec les mêmes simulations en utilisant un MNE issu de données in-situ et LIDAR, il apparaît que le MNE Pléiades induit une surestimation des hauteurs d’eau à terre lors de l’évènement de 2008. Des pistes d’amélioration de construction du MNE sont identifiées. Un MNE issu de données satellitaires reste pertinent pour des territoires ne disposant pas de données terrain plus précises.
  • Cartographie des aléas : en complément de la modélisation HR, l’équipe a cartographié les aléas selon une méthode uniquement basée sur des données satellite, donc déployable sur n’importe quel littoral. Elle a complété ses simulations, calculant au total 24 scénarii de submersion marine sur chaque territoire : sur 4 dates de 2030 à 2100, avec ou sans tempête, et selon les 2 scénarii extrêmes du GIEC (RCP2.6, le plus optimiste, et RCP8.5, le plus pessimiste) en plus de la tendance de montée du niveau des mers observée depuis 30 ans par l’altimétrie satellitaire.
  • Cartographie des risques : des cartes de risques ont été calculées en croisant les enjeux des territoires avec les aléas, selon 5 indicateurs : risque humain, économique, environnemental, patrimonial et tous risques confondus.
Carte de risques

Chaque risque ayant des unités propres (km2, taux…), le degré de risque a été normalisé sur une échelle de 1 à 5. © Littoscope

Pour aller plus loin et fournir des estimations chiffrées plutôt que des degrés de risque, l’équipe a également chercher à estimer la population affectée et les coûts engendrés, en tenant compte de la croissance démographique et économique des territoires.

Estimation du risque

Évaluation de la population affectée et des coûts pour une hausse du niveau de la mer en 2070, selon le scénario du GIEC le plus pessimiste et sans tempête. © Littoscope