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Histoire de SCO : le bilan des 2 ans

Publié le 31/08/2021
En juin 2021, le SCO a soufflé ses deux bougies. Instigateur de l’initiative, la France a façonné le visage de cette alliance d’un nouveau genre. Quoi, pourquoi, comment, quel bilan et quelles perspectives… On fait le point avec Frédéric Bretar, responsable du SCO au CNES.

Quand et comment le SCO est-il né ?

Frédéric Bretar : L’ambition première du SCO est celle des équipes observation de la terre du CNES qui ont voulu donner le cap d’une utilisation des données spatiales pour répondre aux enjeux climatiques, dans le sillage de la mobilisation des agences spatiales suite à la COP21. Suite au retrait des États-Unis de l’Accord de Paris, le Président Macron a lancé une grande mobilisation internationale en créant le sommet international One Planet Summit en décembre 2017, sous la bannière « Rassembler et agir pour la planète». L’Observatoire Spatial du Climat fait partie des initiatives proposées dans ce cadre et dans cet esprit. Le premier acte du SCO a conduit, sur proposition du CNES, à l’engagement de 23 agences spatiales et organisations internationales à travers la signature d’une Déclaration d’intention en juin 2019. Et aujourd’hui, en septembre 2021, nous sommes 33 ! Cette ambition est poursuivie par Philippe Baptiste, actuel Président du CNES, qui a d’ailleurs recueilli l’adhésion du Maroc au SCO début juillet 2021.

Frédéric Bretar

Frédéric Bretar, Responsable du programme SCO au CNES © CNES

Comment passe-t-on de l’ambition au concept ?

F.B. : Entre un environnement international des sujets « climat » occupé depuis de nombreuses années par des acteurs très légitimes (Organisation météorologique mondiale WMO, Système d’observation global du climat GCOS, Centre européen pour les prévisions météorologiques ECMWF) et les corps chargés de l’étude et de l’utilisation de la donnée spatiale (CEOS, Copernicus Services, ESA Climate Change Initiative, GEO etc.), une image nette du SCO a pris du temps à se former. Une chose est certaine, le SCO doit s’articuler avec ces réseaux internationaux.

Le management du SCO mis en place au CNES en septembre 2019 a permis très rapidement de préciser le concept : doté d’une gouvernance adéquate, le SCO sera

  1. un espace de dialogue et de projets rassemblant l’expression des besoins locaux pour mieux connaitre les modifications territoriales récentes et futures liées aux changements climatiques et mieux s’y préparer, et
  2. l’expression de l’expertise scientifique et technique au travers de nombreuses disciplines ayant trait à l’étude des modifications climatiques et de leurs conséquences. Par ailleurs, vivront en étroite adéquation le SCO international, de dimension multilatérale, et des implémentations locales, à l’instar du SCO France.

Plus concrètement, quelles sont les étapes clés de cette jeune histoire ?

F.B. : « L’acte de naissance » a donc été signé le 17 juin 2019. Dès le deuxième semestre 2019, le premier comité de pilotage International a posé les fondations de la gouvernance internationale, tandis que la déclinaison française dite « SCO France » se mettait déjà en place. Avec un rôle de locomotive se devant d’être le plus exemplaire possible, nous y avons entériné un mode de fonctionnement sur projets, l’idéal type d’un projet SCO, puis lancé le premier appel à projets. La première moitié de 2020 a vu l’adoption des Termes de Référence du SCO International, puis la décision de lancer un appel à projet international sous l’égide des agences onusiennes signataires du SCO (UNOOSA et UNDP à l’époque). Au niveau du SCO France, ce fut la gestion du premier appel à projets avec la labélisation de 14 dossiers. Dans le même temps, plusieurs ateliers collaboratifs ont été organisés pour se doter d’une Charte de fonctionnement, publiée en juillet 2020. Le deuxième semestre 2020 a vu se concrétiser la gestion des appels à projets SCO International et SCO France. Le site Web spaceclimateobservatory.org lancé en juin s’étoffe alors rapidement ! Ce site est la vitrine du SCO et - nous l’espérons autant que nous y travaillons - un lien fédérateur de la communauté SCO. Ceci nous amène au premier semestre 2021, une période très dynamique qui s’est ouverte avec une présence remarquée lors du One Planet Summit en janvier. Ont suivi la labélisation de 25 projets en janvier puis 4 autres début juin, ainsi que le lancement des Comités d’accélération SCO, préfigurateurs de SCO locaux en Inde, Indonésie, Maroc, Gabon, Chine, Thaïlande, Mexique. Enfin, la Russie, l’UNEP, Malte, Singapour, l’Indonésie et le Maroc ont rejoint le SCO.

« Nous avançons de manière progressive, ponctuée de points de gouvernance nationaux et internationaux. »

De fait, quel bilan du SCO dressez-vous aujourd’hui ?

F.B. : En deux années, le SCO a permis de labéliser 43 projets, dont 7 internationaux (Chine, Mexique, Maroc, ESA) et 36 portés par le SCO France. Le site Web propose les fiches de ces 43 projets (répartis sur 66 sites géographiques) ainsi que leurs actualités.

Ces six derniers mois, la Chine et le Mexique sont passés de comités d’accélération en SCO opérationnels, le Gabon œuvre à rapidement transformer l’essai lui aussi.

Enfin, avec 10 partenaires internationaux supplémentaires, le SCO est aujourd’hui bien ancré dans le paysage international, même s’il faut garder une pression constructive auprès de nombreux partenaires et potentiels bailleurs. Mais la perspective d’un approfondissement de l’engagement des membres autour d’une Charte internationale - en cours de rédaction - dont le secrétariat général serait porté par l’UNOOSA est très inspirant. A côté des Comités d’accélération SCO, qui permettent à plusieurs signataires de se mettre dans une démarche projet, le SCO France est très bien organisé avec un Comité Inter Organismes regroupant 22 institutions et ministères, un Bureau Exécutif et une Charte de Fonctionnement.

Justement, faisons un zoom sur le SCO France. Quelle activité ! Vous qui avez directement participé à sa mise en œuvre, comment avez-vous procédé ?

F.B. : Si l’on devait passer le SCO France au macroscope, nous y trouverions des outils de gouvernance, un mécanisme de labélisation, un mécanisme d’attribution des financements, des développements projets et des actions de communication/valorisation. Grâce à cette organisation, nous pouvons nous féliciter du succès du Millésime 2021 avec 22 projets labélisés, mais également de l’avancement nominal des 14 projets du Millésime 2020. Cela représente l’implication d’environ 250 personnes issues de 110 institutions et 30 entreprises. Notons également la mise en place des Trimestrielles du SCO France, des séances d’échanges ouverts sur les solutions développées dans les projets. La première avait pour thème « l’utilisation des données satellite dans les projets SCO ». La seconde, prévue le 21 octobre 2021, se consacrera à la télésurveillance épidémiologique. Nous travaillons en parallèle sur la valorisation des projets une fois la période d’accélération terminée.

Le SCO étant porté par les agences spatiales, le CNES est la colonne vertébrale du SCO France. Comment vous organisez-vous pour être présent à chaque niveau ?

F.B. : Ceci se traduit au CNES par une organisation de type matricielle, avec un support secrétariat redoutablement efficace, des supports achats, juridique et budgétaire interne, des correspondants aux relations internationales du CNES, un ensemble de référents en charge du pilotage des projets labélisés, une assistance à maitrise d’ouvrage qui gère la logistique des appels à projets, des réunions de gouvernance, des ateliers collaboratifs, d’actions de communication, et enfin un pôle éditorial qui a principalement la responsabilité du contenu du site Internet.

« En deux années, le SCO a permis de labéliser 43 projets, dont 7 internationaux et 36 portés par le SCO France. »

Parlons à présent des projets qui, tous, développent des outils d’aide à la décision pour s’adapter aux impacts du changement climatique. D’où viennent ces projets et quelles problématiques adressent-ils ?

F.B. : Ces projets épousent des thèmes variés comme la biodiversité, l’agriculture, la gestion de l’eau, la santé, l’occupation des sols, la réponse à des catastrophes naturelles, les évènements météorologiques extrêmes, le tout sur différentes typologies de territoires (côtiers, urbains, forestiers, ruraux, montagneux, tropicaux), sans oublier une thématique éducation. En analysant le portefeuille de projets, on se rend compte que trois catégories coexistent :

  • La première, que j’appelle Frontière, regroupe des projets issus du monde scientifique spatial, avec des cœurs méthodologiques puissants pour l’analyse de données satellite, un potentiel d’extension géographique global et un lien natif avec les futures missions d’observation de la Terre. Ces projets ont un très fort intérêt pour le CNES car ils valorisent parfois toute une filière dans le cadre du SCO.
  • La deuxième catégorie, que j’appelle Accélération, regroupe des consortiums équilibrés entre des méthodologies issues des laboratoires et leur valorisation par une entreprise. Ce transfert de technologie est une aubaine pour la valorisation de la science auprès de la société, l’entreprise est là pour stabiliser le besoin utilisateur et initier un modèle économique du service.
  • La troisième catégorie, que j’appelle Développement, représente des projets menés par une entreprise avec une capacité opérationnelle de développement d’un service technique et commercial.

Quelles sont désormais les prochaines étapes du SCO ?

F.B. : L’activité du second semestre 2021 reste très intense ! Au niveau international, priorité est donnée à la finalisation de la Charte internationale et à sa signature lors de la COP26, début novembre. Cela déclenchera très certainement un nouvel élan, notamment au niveau des SCO locaux qui ont la mission de faire émerger de nouveaux projets pour « Rassembler et agir pour la Planète », ce qui était bien la promesse initiale.

Pour le SCO France, le mécanisme mis en place a fait ses preuves. Une année typique du SCO France sera ponctuée d’un appel à projets, de la gestion des millésimes en cours, d’actions de communication et de valorisation. En fonction du type de projets, des partenariats au-delà du SCO pourront être envisagés (comme des incubateurs Business, des plateformes intégratrices des projets Frontière etc.). Un projet SCO réussi sera celui qui trouvera ses utilisateurs, partagera son expertise voire son cœur algorithmique, afin que nous réussissions, tous ensemble, à donner des outils aux décideurs locaux sur l’ensemble de la planète. D’ailleurs, n’ayant que 24 mois maximum pour devenir des outils opérationnels, les premiers projets commencent à donner leurs fruits, tels SatLCZ et Flaude. Abonnez-vous à notre Newsletter pour suivre toutes les avancées, découvrir les nouveaux projets et participer à des webinaires dédiés !